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vendredi 19 novembre 2010

A propos d'un arrêt de la Cour de cassation du 23/6/2010, sur un internement d'office arbitraire.

Santé publique
 
Dans un arrêt du 23 juin 2010, la Cour de cassation se prononce sur une demande en
dommages-intérêts, à l'encontre de l'agent judiciaire du Trésor et du centre hospitalier,
introduite par une personne hospitalisée d'office ainsi que par ses parents, suite à la décision
d'irrégularité des décisions administratives de placement.
En l'espèce, M. X. avait été hospitalisé d'office dans un centre hospitalier (unité pour malades
difficiles) du 11 avril 2000 au 2 février 2001 en vertu de trois arrêtés préfectoraux. Ces
décisions ayant été annulées par la juridiction administrative, il a, par assignation, introduit
une action en dommages-intérêts à l'encontre de l'agent judiciaire du Trésor et du centre
hospitalier. Par le même acte, ses parents ont présenté une demande en réparation du
préjudice subi du fait de l'hospitalisation de leur fils.

Premièrement, pour se dire incompétente pour statuer sur la demande en réparation de M. X.
et de ses parents à l'encontre du centre hospitalier, l'arrêt contesté (CA de Paris, 3 févr.
2009) retient qu'au regard des certificats médicaux établis en avril 2002, aucune voie de fait
ne permet de justifier la compétence des juridictions de l'ordre judiciaire. La Cour de
cassation, au visa de la loi des 16-24 août 1790, ensemble les articles L. 3213-1 à L. 3213-
10 du Code de la santé publique, estime qu'en statuant ainsi, « alors que les tribunaux
judiciaires sont seuls compétents pour apprécier les conséquences dommageables résultant
de l'irrégularité des décisions administratives de placement ou de maintien sous le régime de
l'hospitalisation d'office, la cour d'appel a violé les textes susvisés ».

Deuxièmement, pour débouter les parents de leur demande en réparation du préjudice subi
du fait de l'hospitalisation de leur fils présentée contre l'agent judiciaire du Trésor, l'arrêt
d'appel retient qu'ils ne justifient pas d'un préjudice direct causé par l'illégalité des arrêtés
préfectoraux de placement, dont l'annulation, pour des motifs formels ne peut être
génératrice d'un préjudice direct causé à des tiers à ces actes. Au visa de l'article 1382 du
Code civil, la Cour de cassation décide au contraire que le placement irrégulier de M. X. en
milieu psychiatrique « cause à ses parents un préjudice direct dont ils sont bien fondés à
demander réparation ».

Troisièmement, pour limiter à la somme de 10 000
à M. X. en réparation de son préjudice, l'arrêt d'appel retient que nonobstant les irrégularités
formelles des arrêtés ordonnant son placement d'office, celui-ci était justifié par son état
pathologique préalable à l'irrégularité commise. La Haute juridiction décide qu'en vertu des
articles 5-1 et 5-5 de la Convention EDH et l'article 1382 du Code civil, M. X « pouvait
prétendre à l'indemnisation de l'entier préjudice né de l'atteinte portée à sa liberté par son
hospitalisation d'office irrégulièrement ordonnée ».
La Cour casse et annule l'arrêt dans toutes ses dispositions.
le montant des dommages-intérêts dus
Source
Cass. 1re civ., 23 juin 2010, n° 09-66.026, F P+B+I
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Demande d'indemnisation suite à l'annulation de décisions d'hospitalisation d'office.

30/06/2010
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Cet arrêt lui même:

Cour de cassation

chambre civile 1

Audience publique du 23 juin 2010

N° de pourvoi: 09-66026

Publié au bulletin

Cassation partielle

M. Charruault, président

Mme Bobin-Bertrand, conseiller apporteur

M. Sarcelet, avocat général

Me Le Prado, Me Ricard, SCP Ancel et Couturier-Heller, avocat(s)



REPUBLIQUE FRANCAISE

AU NOM DU PEUPLE FRANCAIS

LA COUR DE CASSATION, PREMIÈRE CHAMBRE CIVILE, a rendu l’arrêt suivant :  


Attendu que M. X... a été hospitalisé d’office au centre hospitalier de Montfavet (unité pour malades difficiles) du 11 avril 2000 au 2 février 2001 par arrêtés préfectoraux des 11 avril, 10 mai et 9 août 2000 ; que ces décisions ayant été annulées par la juridiction administrative, il a, par assignation du 26 mars 2003, introduit une action en paiement de dommages-intérêts à l’encontre de l’agent judiciaire du Trésor et du centre hospitalier de Montfavet ; que par le même acte, M et Mme X..., ont présenté une demande en réparation du préjudice subi du fait de l’hospitalisation de leur fils ;


Sur le premier moyen, pris en sa seconde branche :


Vu la loi des 16-24 août 1790, ensemble les articles L. 3213-1 à L. 3213-10 du code de la santé publique ;


Attendu que pour se dire incompétente pour statuer sur la demande en réparation de M. X... et de ses parents à l’encontre du centre hospitalier de Montfavet, l’arrêt retient qu’au regard des certificats médicaux établis en avril 2002, aucune voie de fait ne permet de justifier la compétence des juridictions de l’ordre judiciaire ;


Qu’en statuant ainsi, alors que les tribunaux judiciaires sont seuls compétents pour apprécier les conséquences dommageables résultant de l’irrégularité des décisions administratives de placement ou de maintien sous le régime de l’hospitalisation d’office, la cour d’appel a violé les textes susvisés ;


Et sur le deuxième moyen :


Vu l’article 1382 du code civil ;


Attendu que pour débouter M et Mme X... de leur demande en réparation du préjudice subi du fait de l’hospitalisation de leur fils présentée contre l’agent judiciaire du Trésor, l’arrêt retient qu’ils ne justifient pas d’un préjudice direct causé par l’illégalité des arrêtés préfectoraux de placement, dont l’annulation, pour des motifs formels ne peut être génératrice d’un préjudice direct causé à des tiers à ces actes ;


Qu’en statuant ainsi, alors que le placement irrégulier de M. X... en milieu psychiatrique cause à ses parents un préjudice direct dont ils sont bien fondés à demander réparation, la cour d’appel a violé le texte susvisé ;


Et sur le troisième moyen :


Vu les articles 5-1 et 5-5 de la convention européenne des droits de l’homme et des libertés fondamentales, ensemble l’article 1382 du code civil ;


Attendu que pour limiter à la somme de 10 000 euros le montant des dommages-intérêts dus à M. X... en réparation de son préjudice, l’arrêt retient que nonobstant les irrégularités formelles des arrêtés ordonnant son placement d’office, celui-ci était justifié par son état pathologique préalable à l’irrégularité commise ;


Qu’en statuant ainsi, alors que M. X... pouvait prétendre à l’indemnisation de l’entier préjudice né de l’atteinte portée à sa liberté par son hospitalisation d’office irrégulièrement ordonnée, la cour d’appel a violé les textes susvisés ;


PAR CES MOTIFS, et sans qu’il y ait lieu de statuer sur la première branche du premier moyen :


CASSE ET ANNULE, dans toutes ses dispositions, l’arrêt rendu le 3 février 2009, entre les parties, par la cour d’appel de Paris ; remet, en conséquence, la cause et les parties dans l’état où elles se trouvaient avant ledit arrêt et, pour être fait droit, les renvoie devant la cour d’appel de Paris, autrement composée ;


Condamne l’agent judiciaire du Trésor et le Centre hospitalier de Montfavet aux dépens ;


Vu l’article 700 du code de procédure civile, rejette les demandes ;


Dit que sur les diligences du procureur général près la Cour de cassation, le présent arrêt sera transmis pour être transcrit en marge ou à la suite de l’arrêt cassé ;


Ainsi fait et jugé par la Cour de cassation, première chambre civile, et prononcé par le président en son audience publique du vingt-trois juin deux mille dix.


MOYENS ANNEXES au présent arrêt


Moyens produits par Me Ricard, avocat aux conseils pour M. Lionel X..., de M. Bernard X... et de Mme Z... ;



PREMIER MOYEN DE CASSATION


Il est fait grief à l’arrêt attaqué d’avoir confirmé le jugement sur l’incompétence retenue pour connaître de l’action intentée par Monsieur Lionel X... et Monsieur et madame X... contre le Centre Hospitalier de Montfavet ;


AUX MOTIFS PROPRES QUE « si les appelants excipent d’une faute commise à leur préjudice par le Centre Hospitalier de Montfavet en ce qu’il aurait fautivement admis M. L. X..., ne les auraient pas informés des recours dont ils pouvaient disposer contre cette admission ou encore en l’ayant maintenu en placement à partir d’actes médicaux erronés transgressant, par-là, les dispositions de l’article 5-2 de la CEDH, force reste de constater que seule une irrégularité du placement sur une période restée limitée, entre le 11 avril 2000 et le 10 août 2000, a été retenue et ce alors que les décisions ultérieurement prises à cet effet n’ont jamais été attaquées ;


Considérant, en outre et surtout, que devant les constatations alors opérées résultant, notamment, des certificats médicaux établis les 12 avril 2002, (lire 2000) certificats évoquant ou faisant état d’une” dangerosité potentielle”, (21 avril 2002 lire 2000) d’’une humeur hypersthénique, des traits de personnalité paranoïaques évidents et d’une absence totale de prise de conscience”, ceux ultérieurs évoquant, encore, “une personnalité pathologique avec hypertrophie du moi, agressivité quérulence, processivité et rigidité du mode de pensée, juridisme et formalisme” , aucune voie de fait permettant de justifier la compétence des juridictions de l’ordre judiciaire n’est en l’espèce établie et qu’il convient donc de confirmer le jugement déféré en ce qu’il s’est déclaré incompétent et renvoyé les parties à mieux se pourvoir sur les demandes présentées par les appelants à l’encontre du Centre Hospitalier de Montfavet qui d’ailleurs n’a été l’auteur d’aucune des décisions irrégulières».


ET AUX MOTIFS ADOPTES QUE «s’agissant des fautes alléguées à l’encontre des médecins qui l’ont soigné durant son séjour au Centre Hospitalier de Montafvet, dont la nécessité a été reconnue, elles mettent en cause le fonctionnement d’un service public de santé ; qu’en l’absence de voie de fait Me Pierre RICARD - Avocat aux Conseils - Pourvoi n° D0966026 Page 6/17 caractérisée, seul le juge administratif est compétent pour statuer sur le demande de réparation».


ALORS QUE il ressortait des écritures de Monsieur X... et des pièces versées aux débats, que par jugement rendu le 16 janvier 2001, le Tribunal Administratif de Marseille a annulé les deux arrêtés du 11 avril 2000 et du 10 mai suivant pour défaut de motivation, et que par jugement du 13 novembre 2006 le Tribunal Administratif de Marseille a annulé l’arrêté du 9 août 2000 portant reconduction de l’hospitalisation d’office pour une durée de 6 mois, de sorte que toutes les décisions de placement ont été annulées ; qu’en retenant que seule une irrégularité du placement sur une période restée limitée, entre le 11 avril 2000 et le 10 août 2000, a été retenue et ce alors que les décisions ultérieurement prises à cet effet n’ont jamais été attaquées, la Cour d’appel a méconnu les termes du litige et violé les articles 4 et 7 du Code de procédure civile ;


ALORS QUE les tribunaux judiciaires sont seuls compétents d’une part pour apprécier la nécessité et le bien-fondé de la mesure d’internement ainsi que pour réparer éventuellement les dommages susceptibles de résulter de ce point de vue d’un internement arbitraire et d’autre part pour statuer sur l’ensemble des conséquences dommageables découlant de l’irrégularité de la décision administrative de placement annulée par le juge administratif ; qu’en se déclarant incompétent pour connaître de l’action indemnitaire des consorts X... à l’encontre du Centre Hospitalier de Montfavet fondée d’une part sur le placement arbitraire de Monsieur Lionel X... et son transfert en unité pour malades difficiles et d’autre part sur l’annulation des arrêtés d’hospitalisation au motif erroné qu’aucune voie de fait permettant de justifier la compétence des juridictions de l’ordre judiciaire n’était en l’espèce établie, la Cour d’appel a violé la loi des 16-24 août 1790, ensemble les articles L. 3213-1 à L. 3213-10 du Code de la santé publique et l’article 5 de la Convention européenne de sauvegarde des droits de l’homme et des libertés fondamentales ;



DEUXIEME MOYEN DE CASSATION


Il est fait grief à l’arrêt attaqué d’avoir confirmé le jugement sur le rejet des demandes présentées par Monsieur et Madame X... contre l’Agent judiciaire du Trésor ;


AUX MOTIFS QUE «les parents de M. L. X... ne justifient pas d’un préjudice direct causé par l’illégalité des arrêtés préfectoraux de placement dont l’annulation, pour des motifs formels, ne peut être génératrice d’un préjudice direct causé à des tiers à ces actes».


ALORS QUE pour être réparable, il suffit que le préjudice invoqué soit personnel, direct et certain ; que subissent un préjudice moral direct les parents dont le fils est victime d’un internement psychiatrique jugé irrégulier ; qu’en rejetant la demande de Monsieur et Madame X... en réparation du préjudice moral qu’ils ont subi du fait de l’internement irrégulier de leur fils au motif erroné que l’annulation des arrêtés de placement, pour des motifs formels, ne peut être génératrice d’un préjudice direct causé à des tiers à ces actes, la Cour d’appel a violé l’article 1382 du Code civil.




TROISIEME MOYEN DE CASSATION


Il est fait grief à l’arrêt attaqué d’avoir limité le montant des dommages et intérêts compensateurs du dommage causé à Monsieur Lionel X... à la somme de 10.000 euros ;


AUX MOTIFS QUE « l’état pathologique de l’appelant n’est plus utilement démenti et qu’il convient, en conséquence, à partir de l’existence de cet état, état préalable à la faute commise, des difficultés inéluctables auxquelles M. L. X... était exposé non par l’effet exclusif de la faute commise mais par celui de son état de santé, tenant compte aussi de ce qu’il était installé depuis 1999 seulement et avait personnellement perçu, sur les trois mois antérieurs à son placement, une somme de 130.960 F., tenant compte encore de ce que sa situation individuelle imprégnée d’une forte violence pathologique était telle qu’elle l’avait conduit à l’acquisition d’une arme, un fusil de chasse de calibre 12 et de munitions stockées chez lui, d’éléments suffisants pour chiffrer à 10.000 € le montant du préjudice subi restant en lien de causalité avec la faute préjudiciable commise ».


ALORS QUE Monsieur Lionel X... faisait état de plusieurs chefs de préjudice, tirés notamment des conditions de son hospitalisation, du préjudice moral résultant de la durée de celle-ci, de la perte de revenus et d’exploitation du cabinet médical, de la perte de sa clientèle consécutive à la durée de l’hospitalisation et des frais d’hospitalisation qui lui ont été facturés; que la cour d’appel, en s’abstenant de dire la raison pour laquelle elle excluait l’indemnisation de ces préjudices, n’a pas donné de motifs à sa décision en violation des articles 455 et 458 du nouveau Code de procédure civile ;


ALORS QUE en vertu du principe de la réparation intégrale, la victime doit être replacée dans la situation où elle se serait trouvée si l’acte dommageable ne s’était pas produit ; qu’après avoir relevé l’irrégularité du placement de Monsieur Lionel X... en hôpital psychiatrique, la cour d’appel a limité l’indemnisation de son préjudice à une fraction de la perte de revenus dont il faisait état ; qu’en refusant d’indemniser, au motif inopérant d’un état pathologique préexistant à son internement, l’entier préjudice subi du fait de l’internement irrégulier, la Cour d’appel a violé l’ article 1382 du Code civil.


Publication :


Décision attaquée : Cour d’appel de Paris du 3 février 2009


Titrages et résumés : CONVENTION EUROPEENNE DES DROITS DE L’HOMME - Article 5 - Droit à la liberté et à la sûreté - Privation - Cas - Détention - Détention d’un aliéné - Régularité - Défaut - Effet

Viole les articles 5 §1 et 5 § 5 de la Convention de sauvegarde des droits de l’homme et des libertés fondamentales, ensemble l’article 1382 du code civil, la cour d’appel qui, pour limiter le montant des dommages-intérêts dus à une personne hospitalisée d’office en exécution d’arrêtés préfectoraux, retient que nonobstant les irrégularités formelles de ces décisions, son placement était justifié par son état pathologique préalable, alors que l’intéressé pouvait prétendre à l’indemnisation de l’entier préjudice né de l’atteinte portée à sa liberté par son hospitalisation d’office irrégulièrement ordonnée


RESPONSABILITE DELICTUELLE OU QUASI DELICTUELLE - Dommage - Réparation - Etendue - Applications diverses - Hospitalisation d’office irrégulièrement ordonnée

HOPITAL - Malades mentaux - Hospitalisation d’office - Décision administrative - Régularité - Défaut - Sanction



Précédents jurisprudentiels : Sur le droit à l’indemnisation de l’entier préjudice résultant d’une hospitalisation d’office irrégulièrement ordonnée, dans le même sens que :1re Civ., 31 mars 2010, pourvoi n° 09-11.803, Bull. 2010, I, n° 77 (rejet)


Textes appliqués :
·          article 5 § 1 et 5 de la Convention de sauvegarde des droits de l’homme et des libertés fondamentales ; article 1382 du code civil
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Mercredi 30 juin 2010. Dépêche Jurisclasseur.

Cour administrative d'appel de Paris, 23/3/2005, aff. André Bitton C/ CHS Perray-Vaucluse.

LA COUR ADMINISTRATIVE D'APPEL                       
                             DE PARIS

No OIPA02667
                                                                                             REPUBLIQUE FRANÇAISE
M.André BITTON
                                                                                      AU NOM DU PEUPLE FRANÇAIS
Mme Cartal
Président
                                                                                      La Cour administrative d'appel de Paris
Mme Descours‑Gatin
Rapporteur                                                                                    (3 ème Chambre A)

Mme Folscheid
Commissaire du gouvernement

Audience du 9 mars 2005
Lecture du 23 mars 2005

Vu la requête, enregistrée le 9 août 2001, présentée pour M. André BITTON, par la SCP Mayet, Dervieux, Perrault; M. BITTON demande à la cour :

1°) d'annuler le jugement n' 975395 en date du 26 février 2001 par lequel le Tribunal administratif de Versailles a rejeté sa demande tendant à la condamnation du centre hospitalier spécialisé Perray Vaucluse à lui verser les sommes de 69 000 F et de 708 000 F, avec intérêts ;

2°) de condamner le centre hospitalier spécialisé Perray Vaucluse à lui payer la somme de 69 000 F avec intérêts à compter du 5 juin 1994, à titre de complément de salaire ainsi que la somme de 708 000 F avec intérêts à compter du 14 juin 1994 au titre du préjudice moral subi du fait d'une rémunération insuffisante pour les travaux effectués au titre de l'ergothérapie durant son séjour dans ce centre hospitalier du 25 juin 1986 au 1er mars 1988

3°) de condamner le centre hospitalier spécialisé Perray Vaucluse à lui payer la somme de 10 000 F sur le fondement de l'article L. 761 ‑1 du code de justice administrative ;

M. BITTON soutient que le code du travail s'applique à l'ergothérapie, à moins qu'un texte spécifique de nature législative n'exclut l'application de ce code dans ce cas ; qu'il n'existe pas de loi dérogeant à l'application du droit commun pour l'ergothérapie ; que, si le Tribunal administratif de Versailles énonce que la rémunération due au titre de l'ergothérapie a comme fondement légal l'article 7 de la loi du 30 juillet 1898 sur laquelle repose l'arrêté du 4 février 1958, cet arrêté est pris non pas en application de la loi du 30 juillet 1898, mais de la loi du 30 juin 1838 ; que le visa de l'article 7 de cette loi de 1838 n'emporte pas exclusion de l'application du code du travail puisque cette loi ne concerne pas le travail que peut effectuer une


personne dans le cadre d'une hospitalisation, mais seulement les modalités d'entrée et de sortie des hospitalisations ; que les personnes hospitalisées, qui sont soumises à des horaires précis et réguliers et doivent exécuter des tâches déterminées dans le centre hospitalier, effectuent un véritable travail ; que leur rémunération est donc un salaire qui doit correspondre à un salaire minimum et équitable, conformément aux dispositions de l'article 4 de la charte sociale européenne ; que durant son hospitalisation il était chargé de faire la vaisselle et diverses autres tâches ménagères pénibles et qu'on ne peut soutenir que le travail dont il était chargé était strictement thérapeutique, d'autant qu'il était sous rémunéré

Vu le jugement attaqué

Vu le mémoire en défense, enregistré le 6 mai 2002, présenté par le centre hospitalier Perray Vaucluse à Epinay‑sur‑Orge (91360), représenté par son directeur en exercice, par Me Rozenberg, qui conclut à titre principal à ce que la cour se déclare incompétente au profit des juridictions judiciaires pour statuer sur les demandes de M. BITTON au titre de la période d'hospitalisation d'office du 7 février 1986 au 23 juin 1986 et rejette les conclusions de M. BITTON relatives au versement d'un salaire pour la période d'hospitalisation libre du 24 juin 1986 au Ier mars 1988 ; à titre subsidiaire de dire et juger que les demandes de M. BITTON portant sur des rappels de salaires sont atteintes par la prescription de l'article 2277 du code civil ; et, en tout état de cause à la condamnation de M. BITTON au versement d'une somme de 1 500 euros au centre hospitalier au titre de l'article L. 8‑1 du code des tribunaux administratifs ; le centre hospitalier soutient que les demandes de M. BITTON portant sur les travaux effectués pendant la période d'hospitalisation d'office sont de la compétence des juridictions judiciaires ; que le travail effectué dans le cadre de l'ergothérapie ne saurait constituer une relation soumise aux dispositions du code du travail et, en conséquence, entraîner le paiement d'un salaire ; qu'il a versé à M. BITTON un pécule au titre de l'ergothérapie dont le montant ‑est conforme à l'arrêté et à la circulaire du 4 février 1958, textes applicables ; qu'à supposer que l'argumentation de M. BITTON visant à solliciter des salaires soit fondée, ces demandes sont prescrites, l'article 2277 du code civil disposant que les actions en paiement des salaires se prescrivent par cinq ans ,

Vu le mémoire en réplique, enregistré le 9 septembre 2002, présenté pour M. BITTON, qui conclut aux mêmes fins que précédemment par les mêmes moyens ; M. BITTON soutient en outre que, dès le mois d'août 1990, il avait saisi le Tribunal administratif de Paris d'une demande tendant à l'annulation de son placement d'office en date du 7 février 1986 et que cet acte de procédure a interrompu la prescription ; qu'au surplus, le centre hospitalier spécialisé Perray Vaucluse étant un établissement public, la prescription qui lui a été opposée ne serait pas celle de l'article 2277 du code civil et ne pourrait en aucun cas être soulevée par l'avocat du centre hospitalier ;

Vu le mémoire en duplique, enregistré le 26 décembre 2002, présenté pour le centre hospitalier Perray Vaucluse, qui conclut aux mêmes fins que précédemment par les mêmes moyens ; le centre hospitalier soutient en outre que la demande présentée par M. BITTON devant le Tribunal administratif de Paris au mois d'août 1990 ne tendait nullement à la réclamation de ce qu'il prétendrait être des salaires et qu'il n'a fait état d'une telle prétention pour la première fois que par sa requête du 8 août 1995 , que M. BITTON ne mentionne pas quelle serait la prescription applicable ;

Vu le mémoire en réplique, enregistré le 17 avril 2003, présenté pour M. BITTON, qui conclut comme précédemment par les mêmes moyens ; M. BITTON soutient en outre que la demande qu'il a présentée au mois d'août 1990 tendant à l'annulation de la décision ordonnant son placement d'office est manifestement de celles qui interrompent la prescription au sens de l'article 2244 du code civil ;

En application de l'article R. 611‑7 du code de justice administrative, les parties avant été informées de ce que l'examen de la requête était susceptible d'être fondé sur un moyen relevé d'office ;

Vu le mémoire, enregistré le 16 février 2005, produit pour NI. BITTON en réponse au moyen d'ordre public qui lui a été communiqué ; M. BITTON sollicite de la cour qu'elle se déclare incompétente au profit du juge judiciaire pour l'examen des conséquences du maintien en service libre pour la période comprise entre le 25 juin 1986 et le 1" mars 1988, qui est constitutif d'une voie de fait ;

Vu le mémoire, enregistré le 3 mars 2005, produit pour le centre hospitalier PerrayVaucluse en réponse au moyen d'ordre public qui lui a été communiqué ; le centre hospitalier soutient que, contrairement à ce que soutient M. BITTON, son maintien en hospitalisation libre à compter du 25 juin 1986 n'est pas constitutif d'une voie de fait ; que, si l'arrêt de la cour en date du 4 décembre 2001 a annulé la décision de placement libre en date du 25 juin 1986, la cour n'en a pas pour autant déduit que le maintien en hospitalisation libre constituait une voie de fait ; que, selon la jurisprudence, les tribunaux judiciaires ne sont compétents que pour statuer sur les conséquences dommageables des irrégularités entachant la mesure de placement d'office



Vu les autres pièces du dossier

Vu le code de la santé publique

Vu l'arrêté ministériel du 4 février 1958 relatif à l'organisation du travail thérapeutique dans les hôpitaux psychiatriques ,

Vu le code de justice administrative

Les parties ayant été régulièrement averties du jour de l'audience ,

Après avoir entendu au cours de l'audience publique du 9 mars 2005

‑ le rapport de Mme Descours‑Gatin, rapporteur,

‑ les observations de Me Mir, pour M. BITTON,

‑ et les conclusions de Mme Folscheid, commissaire du gouvernement

Considérant que M. BITTON, qui demande la condamnation du centre hospitalier spécialisé Perray Vaucluse à lui payer la somme de 69 000 F à titre de complément de salaire ainsi que la somme de 708 000 F au titre du préjudice moral qu'il aurait subi du fait d'une rémunération insuffisante pour les travaux effectués au titre de l'ergothérapie durant son séjour dans ce centre hospitalier du 25 juin 1986 au 1er mars 1988, doit être regardé comme ne demandant l'annulation du jugement du Tribunal administratif de Versailles qu'en tant que ce jugement a rejeté ses conclusions indemnitaires pour la période comprise entre le 25 juin 1986 et 1e ler mars 1988, au cours de laquelle il a été admis au centre hospitalier en service libre ;



Considérant qu'il résulte de l'instruction qu'à la suite de l'abrogation, par arrêté du préfet de police du 23 juin 1986, de l'arrêté en date du 7 février 1986 portant placement d'office au centre hospitalier spécialisé Perray‑Vaucluse de M. BITTON, ce dernier a alors été retenu, à compter du 25 juin 1986, au service libre de cet établissement sur le seul fondement d'un bulletin d'admission motivé par le médecin chef de l'établissement par l'état de santé de l'intéressé et signé par le directeur du centre

Considérant que, par un arrêt en date du 4 décembre 2001, la cour de céans a annulé la décision en date du 25 juin 1986 par laquelle M. BITTON a été admis en service libre au centre hospitalier spécialisé Perray Vaucluse à compter de cette date au motif qu'il n'était ni établi que l'intéressé ait présenté une demande ni que son consentement à l'hospitalisation libre ait été recueilli, ni davantage établi qu'il ait été informé du passage du régime de placement d'office à celui de l'hospitalisation libre ;

Considérant qu'une personne majeure présentant des signes de maladie mentale, ne peut être retenue contre son gré dans un établissement d'hospitalisation que pendant le temps strictement nécessaire à la mise en oeuvre des mesures d'internement d'office ou de placement volontaire prévues par le code de la santé publique ; que M. BITTON s'étant refusé à demander son placement volontaire, il appartenait à l'administration hospitalière, dans le cas où les médecins de l'hôpital estimaient que le maintien de ce patient en milieu psychiatrique s'imposait, dans son intérêt ou celui des tiers, de demander à l'autorité préfectorale d'user des pouvoirs qu'elle tient des dispositions du code de la santé publique, et, notamment, de son article L. 350 ; que, dès lors, en l'absence de tout titre l'autorisant légalement, le maintien contre son gré de M. BITTON au centre hospitalier spécialisé Perray‑Vaucluse jusqu'au 1er mars 1988 a constitué une voie de fait ;

Considérant que l'action en réparation de l'ensemble des dommages résultant de cette voie de fait relève de la compétence des tribunaux judiciaires ; qu'il en va ainsi tant du préjudice résultant de la privation de liberté du fait du maintien contre son gré de M. BITTON en service psychiatrique, que de l'indemnité correspondant aux allocations que l'intéressé aurait été en droit de percevoir si les activités d'ergothérapie avaient été légalement pratiquées ; que, dès lors, il y a lieu d'annuler le jugement en date du 26 février 2001 du Tribunal administratif de Versailles en tant qu'il s'est reconnu compétent pour connaître de la demande de M. BITTON tendant à la condamnation du centre hospitalier spécialisé Perray Vaucluse à lui verser les sommes de 69 000 F et de 708 000 F et de rejeter sa demande de première instance comme portée devant une juridiction incompétente pour en connaître

Sur l'application des dispositions de l'article L. 761‑1 du code de Justice administrative :

Considérant qu'il n'y pas lieu, dans les circonstances de l'espèce, de faire application des dispositions de l'article L. 761‑1 du code de justice administrative ;




D É C I D E

Article 1er : Le jugement du Tribunal administratif de Versailles en date du 26 février 2001 est annulé en tant qu'il a rejeté la demande de M. BITTON tendant à la condamnation du centre hospitalier spécialisé Perray Vaucluse à lui verser les sommes de 69 000 F et de 708 000 F.

Article 2 : La demande présentée devant le Tribunal administratif de Versailles par M. BITTON est rejetée comme portée devant une juridiction incompétente pour en connaître.

Article 3 : Le sur‑plus des conclusions de la requête de M. BITTON et les conclusions du centre hospitalier Perray Vaucluse tendant à l'application de l'article L. 761‑1 du code de justice administrative sont rejetés.

Article 4 : Le présent arrêt sera notifié à M. André BITTON et au centre hospitalier spécialisé Perray Vaucluse. Copie en sera adressée au ministre des solidarités, de la santé et de la famille.

Aff. André Bitton et GIA. Cour administrative d'appel de Paris, 4/12/2001.


N° 96PA00717                                                    RÉPUBLIQUE FRANÇAISE
M. BITTON
                                                                         AU NOM DU PEUPLE FRANÇAIS
M. JANNIN, Président
M. COIFFET, Rapporteur
M. HEU
Commissaire du Gouvernement --------------
Séance du 20 novembre 2001
Lecture du 4 décembre 2001
LA COUR ADMINISTRATIVE D'APPEL DE PARIS(4ème chambre A)
VU, enregistrée au greffe de la cour, le 15 mars 1996, l'ordonnance n° 177399 en date du 21 février 1996 par laquelle le président de la section du contentieux du Conseil d'Etat a attribué à la cour administrative d'appel de Paris le jugement de la requête ci-après visée de M. BITTON ;
VU, enregistrée au greffe de la cour le 15 mars 1996, la requête présentée par M. André BITTON ; M. BITTON demande à la cour :
1°) d'annuler le jugement du tribunal administratif de Paris en date du 9 décembre 1994 en tant qu'il a rejeté ses demandes tendant à l'annulation, d'une part, de la décision de l'administrateur de l'infirmerie psychiatrique de la préfecture de police de Paris ordonnant son transfert au centre hospitalier, d'autre part, de la décision d'admission prise à son encontre par le directeur du centre, de la décision d'admission à l'infirmerie psychiatrique de la préfecture de police, enfin de la décision par laquelle le centre hospitalier de Perray-Vaucluse aurait retardé son départ après l'abrogation de la mesure de placement d'office par un arrêté en date du 23 juin 1986 notifié le 24 juin 1986 ;
2°) d'annuler les décisions en cause ;
3°) de condamner le centre hospitalier de Perray-Vaucluse à lui payer 10 000 F au titre de l'article L. 8-1 du code des tribunaux administratifs et des cours administratives d'appel ;
M. BITTON soutient que, contrairement à ce qu'a jugé le tribunal, les décisions administratives précitées ont par elles-mêmes une autonomie, chacune lui faisant grief ; que le jugement attaqué est dépourvu de motivation ; qu'en effet, le tribunal ne pouvait sans véritable motivation déclarer ses demandes irrecevables ou mal fondées alors que chacune d'elle porte atteinte à ses droits ; qu'en second lieu, s'agissant de l'hospitalisation en secteur libre, le tribunal a admis sans répondre à ses conclusions qu'il aurait été nécessairement consentant à son hospitalisation, surtout dans le même établissement où il avait été amené de force, de manière illégale ;
VU le jugement attaqué ;
VU, enregistré au greffe de la cour le 18 décembre 1996, le mémoire en défense présenté par le ministre de l'intérieur qui tend au rejet de la requête ; le ministre fait valoir qu'à la suite de l'abrogation le 23 juin 1986 de l'arrêté de placement d'office du 7 février 1986, l'intéressé a fait l'objet d'un placement volontaire ; que, quant à l'internement de 1990, il s'agit d'un placement volontaire ; qu'il y a lieu de confirmer l'analyse des premiers juges s'agissant du caractère irrecevable des demandes de M. BITTON tendant à l'annulation de son admission à l'infirmerie psychiatrique et de son transfert au centre hospitalier, ces mesures ne constituant pas des décisions mais des actes d'exécution ; qu'en ce qui concerne l'admission au centre hospitalier du 7 février 1986, le maintien au centre hospitalier au-delà du 23 juin 1986 et l'admission sous le régime du placement libre à compter du 25 juin 1986 puis du 6 février 1990, seul le centre hospitalier concerné est compétent pour présenter des observations en défense ;
VU, enregistré au greffe de la cour le 7 janvier 1997, le mémoire en réplique présenté par M. BITTON, qui conclut aux mêmes fins que la requête, et, en outre, à la condamnation de l'État à lui verser 3.000,00 F au titre des frais irrépétibles ; il soutient que le placement volontaire demeure un internement ; que les décisions du chef d'établissement, qui dispose d'une marge d'appréciation de l'ordre qu'il reçoit, sont susceptibles d'être attaquées devant le juge de l'excès de pouvoir ;
VU, enregistré au greffe de la cour le 14 février 1997, le mémoire en défense présenté pour le centre hospitaliser spécialisé de Perray-Vaucluse par la SCP VIER-BARTHÉLÉMY, avocat au Conseil d'Etat et à la cour de cassation ; le centre hospitalier spécialisé demande à la cour de : 1°) rejeter la requête ; 2°) condamner M. BITTON à lui verser la somme de 8.442,00 F sur le fondement de l'article L. 8-1 du code des tribunaux administratifs et des cours administratives d'appel ; il fait valoir, en premier lieu, que la requête est, en l'état, irrecevable pour tardiveté ; qu'en second lieu, la "prétendue décision" d'admission que conteste M. BITTON n'est qu'une simple mesure d'exécution de l'arrêté du préfet de police en date du 7 février 1986 comme l'a jugé à plusieurs reprises le tribunal administratif ; qu'en effet, la décision de placement d'office est prise par le préfet en application de l'ancien article L.343 du code de la santé publique ; que le directeur de l'établissement du centre hospitalier est tenu de se conformer à cette prescription ; qu'en troisième lieu, s'agissant des suites données à l'abrogation du placement d'office, la motivation du tribunal est à l'abri de toute critique ; que le directeur du centre hospitalier s'est borné à exécuter l'arrêté du 23 juin 1986 qui lui a été notifié le 24 juin 1986 et n'a pris aucune décision ayant pour objet ou pour effet de maintenir d'office M. BITTON dans l'enceinte de l'établissement ; que si celui-ci n'a pu quitter l'hôpital que le 25 juin 1986, cette circonstance ne constitue pas une faute imputable à l'exposant dont la responsabilité n'est en tout état de cause pas recherchée qu'il n'est pas possible de mettre instantanément à exécution l'ordre de faire sortir une personne placée d'office mais qu'en outre une telle manière de procéder, à la supposer praticable, serait contraire aux intérêts de la personne en cause, comme au bon fonctionnement du service hospitalier ; qu'en quatrième lieu, s'agissant des décisions du 25 juin 1986 et du 6 février 1990, portant admission en 'service libre au CHS de Perray-Vaucluse, le requérant ne saurait invoquer l'existence d'un quelconque contrat dés lors qu'il est clairement établi par la jurisprudence que les personnes admises dans les services des hôpitaux et hospices publics sont placées dans une situation légale et réglementaire ; qu'il ressort tout d'abord du bulletin délivré le 25 juin 1986 par le médecin chef du service de santé mentale du VIIIème arrondissement de Paris que M. BITTON a été admis, à compter du 25 juin 1986 en service libre, ainsi qu'il le reconnaît lui-même, au centre hospitalier de Perray-Vaucluse ; qu'ensuite, s'agissant de la "prétendue" décision du 6 février 1990, M. BITTON s'est présenté lui-même pour demander son admission en service libre ; que sa requête est par suite sans objet ; qu'en tout état de cause,, il ne rapporte nullement la preuve qui lui incombe qu'il aurait été accueilli et maintenu dans le CHS contre son gré ; qu'au contraire, il reconnaît explicitement qu'il avait la possibilité de sortir dans le parc de l'établissement et en ville de sorte qu'il jouissait d'une totale liberté d'aller et de venir, de communiquer, de s'exprimer ; qu'aussi, les allégations fondées sur la prétendue violation des dispositions de l'article L.353-2 du code de la santé publique ou des articles 5-1, 8, 9 et 10 de la Convention européenne de sauvegarde des droits de l'homme et des libertés fondamentales, qui ne sont assorties d'aucune démonstration pertinente et probante, sont infondées que la seule circonstance que l'établissement n'a pas fait signer à M. BITTON une demande d'hospitalisation ne saurait caractériser la contrainte, ni même la laisser présumer ; qu'en particulier, il y a lieu de rappeler que le requérant disposait de procédures particulières instituées par l'article L.351 ancien du code de la santé publique qui permet à toute personne retenue dans un établissement accueillant des malades soignés pour troubles mentaux de se pourvoir devant le tribunal de grande instance ; qu'enfin, la discussion sur l'éventuelle responsabilité pénale du directeur du CHS est inopérante devant le juge administratif ;
VU, enregistré au greffe de la cour le 28 mars 1997, le mémoire en réplique présenté par M. BITTON, qui tend aux mêmes fins que la requête par les mêmes moyens ; M. BITTON fait valoir, en outre, en premier lieu, qu'ayant sollicité l'aide juridictionnelle dans les deux mois de la notification du jugement attaqué, le 21 décembre 1995, le bureau d'aide juridictionnelle lui a notifié la décision de rejet de sa demande ; que cet acte de notification a fait courir un nouveau délai de deux mois, expirant le 22 février 1996 ; que, comme le constate le CHS, c'est le 7 février qu'il a interjeté appel dans le délai de deux mois ; qu'en second lieu, M. BITTON soutient qu'en étant admis en hospitalisation libre, il aurait dû se trouver en situation contractuelle et non pas placé et traité comme se trouvant en situation légale et réglementaire ; qu'en effet,, la relation légale et réglementaire ne s'applique qu'aux personnes qui se trouvent prises en charge par l'Etat dans le cadre d'un placement ,d'office ou volontaire, non aux personnes qui, en vertu de leur prise en charge par la caisse d'assurance maladie, se font admettre à leur demande dans un établissement public ou privé ; que le maintien en hospitalisation libre ne peut qu'être assimilé à la clinique ouverte ; qu'en effet, on ne peut être légalement maintenu sous ce régime qu'à sa demande expresse qui caractérise un consentement éclairé à l'hospitalisation ; qu'il est possible de sortir à tout moment même lorsque l'on se trouve dans une structure effectivement fermée ; qu'en troisième lieu, en matière d'hospitalisation libre, il importe de rappeler que les soins ne peuvent être dispensés qu'avec le consentement du malade, principe rappelé dans l'article 7 du code de déontologie médicale ; que l'intéressé doit, à l'admission en "hospitalisation libre", être informé de façon suffisante, précise et loyale dans un langage simple et accessible du régime juridique de son admission, de ses droits et de ses devoirs ; qu'il n'y a eu aucune recherche de consentement du maintien en hospitalisation libre ; qu'il appartient au CHS de rapporter la preuve qu'il a rempli ses obligations d'information alors surtout qu'il est établi que durant son "hospitalisation libre", il n'a pas eu notification de l'arrêté de levée de placement d'office ; que l'obligation d'obtenir le consentement du patient au traitement pèse sur le médecin ; que les restrictions apportées par la loi du 2 février 1981 à l'article L.353-2 du CSP n'avaient rien d'une "coquetterie" ; que si le législateur a exclu les CHS du champ d'application des droits et libertés consacrés par ledit article aux personnes admises en psychiatrie en hospitalisation libre, c'est précisément parce qu'il avait entendu exclure des CHS la possibilité d'admettre des personnes sous un tel régime, conscient qu'il était que le personnel de ces services, habitué à admettre des patients aliénés, et par suite déments, était incapable de recueillir, dans ces conditions, la confiance des personnes ; que les personnels qui traitent dans le cadre de la contrainte ne se posent en effet même pas la question de recueillir la confiance de leurs patients ; qu'il n'a pas été informé ni n'a consenti de manière éclairée au changement de son statut comme le révèle bien l'absence d'une quelconque mention à cet effet sur le certificat de sortie du placement d'office ; que les médecins ne mentionnent précisément des observations qu'aux 7 février 1986, 18 février 1986, 23 mars 1986, 22 avril 1986 ; que l'on passe subitement aux 27 juin 1986, 18 juillet 1986, 25 août 1986 ; que si pendant deux mois, rien n'a été consigné, c'est qu'en vérité, il n'y a eu aucune recherche de consentement pour un tel maintien en hospitalisation libre ; que ce n'est d'ailleurs que le 12 janvier 1987 qu'une "carte de permission" a été établie ; que le fait d'avoir des permissions de sortie ponctuelles à partir de cette date ne sauraient être la preuve qu'il a été informé de son changement de régime et de ses droits nouveaux tant il est constant qu'un très grand nombre de personnes obtenaient à cette époque, non pas seulement des permissions de sortie de quelques heures mais d'une ou de plusieurs journées tout en étant demeurées sous placement d'office ; que le CHS n'établit même pas ni même n'invoque qu'à un seul moment il ait cherché à s'assurer de la validité de son consentement ; qu'en quatrième lieu, s'agissant du caractère distinct des mesures d'admission mais surtout de maintien sous PO prises par le chef d'établissement eu égard à la décision préfectorale, si le législateur, aux termes de l'article L.355 du code de la santé publique, a pris grand soin de ne pas viser les articles L.343 et L.344 dudit code, c'est parce qu'il a entendu ériger le chef d'établissement en autorité de contrôle de la légalité de l'admission ; qu'il doit s'assurer, ne serait-ce que sommairement, que les pièces qui lui sont remises à l'admission ne sont pas manifestement irrecevables ou mal formées conformément à l'article L.333 du code ; qu'en l'occurrence, le directeur du CHS ne pouvait admettre une personne en placement d'office au vu d'un arrêté de PO qui ne mentionnait pas la fréquence des actes de démence et le risque qui pouvait en résulter pour lui-même ou pour autrui voire pour l'ordre public ce, d'autant plus que l'ordre émanait du préfet de police, incompétent territorialement pour le département de l'Essonne en matière de placement des aliénés au titre de l'article L.343 ancien du code de la santé publique ; que la faute du chef d'établissement est d'autant plus grave qu'aux termes de l'article L.345 du code de la santé publique, il se devait d'adresser un rapport circonstancié au préfet dans le premier mois de chaque semestre d'hospitalisation, le préfet étant tenu de se prononcer au vu de ce rapport sur la nécessité du maintien ou d'ordonner la sortie ; que ce n'est que le 13 mars 1986 qu'une demande d'abrogation de placement fut adressée à l'autorité préfectorale ; que ce n'est que le 15 avril que le CHS a été destinataire de la réponse du préfet ;
VU, enregistré au greffe de la cour le 18 août 1997, le mémoire présenté pour M. BITTON par Me CAPRON, avocat au Conseil d'Etat et à la cour de cassation, qui tend aux mêmes fins et par les mêmes moyens que ses écritures précédentes ;
VU, enregistré au greffe de la cour le 22 août 1997, le mémoire en défense présenté pour le centre hospitalier spécialisé du Perray-Vaucluse ; le CHS fait valoir que la requête déposée par M. BITTON le 18 août 1997 est la réitération de celle déjà formée par l'intéressé contre le même jugement et enregistrée à la cour le 15 mars 1996 après l'avoir été semble-t-il au Conseil d'Etat le 7 février 1996 ; que cette requête est irrecevable ; qu'en toute hypothèse, elle est tardive ; que la circonstance que M. BITTON aurait obtenu l'aide juridictionnelle par décision n° 97/010776 du 16 juin 1997 ne saurait avoir pour effet de rendre recevable une nouvelle requête ; qu'il faudrait que le requérant établisse qu'il a introduit la demande d'aide juridictionnelle dans les deux mois de la notification du jugement du 9 décembre 1994 ; qu'en l'état, ce n'est ni allégué, ni moins encore prouvé ;
VU l'ordonnance de clôture de l'instruction en date du 1er septembre 1998 du président de la 4ème chambre de la cour administrative d'appel de Paris ;
VU, enregistrées au greffe de la cour le 21 septembre 1998, le mémoire complémentaire et en réplique présenté pour M. BITTON par Me CAPRON, qui persiste dans ses conclusions ; M. BITTON fait en outre valoir, s'agissant de la recevabilité de sa requête, qu'il avait introduit un recours devant le Conseil d'Etat portant le n° 177399 contre le jugement n° 9006928/4 du 9 décembre 1994 du tribunal administratif, notifié le 19 janvier 1995 ; qu'il avait introduit une demande d'aide juridictionnelle devant le Conseil d'Etat le 15 février 1995 ; que celui-ci, par une décision du 8 décembre 1995, notifiée le 19, a rejeté sa demande ; que sur recours exercé contre cette décision, le président de la section du contentieux a, par une ordonnance du le` février 1996, confirmé cette décision ; que M. BITTON a introduit un recours enregistré au greffe du Conseil d'Etat sous le n° 177399, lequel a finalement été transmis à la cour administrative d'appel et enregistré sous le n° 96PA00717 le 15 mars 1996 ; que sa requête est ainsi bien recevable ; que ce n'est qu'ensuite, après la décision d'admission du bureau d'aide juridictionnelle du tribunal de grande instance de Paris le désignant pour assister M. BITTON, que l'avocat a déposé un recours en appel qui n'avait en réalité pour objet que de formaliser la demande de M. BITTON ; que le recours du 18 août 1997 doit s'incorporer aux écritures produites par le requérant lui-même ;
VU l'ordonnance de réouverture de l'instruction en date du 12 octobre 1998 du président de la 4ème chambre de la cour administrative d'appel de Paris ;
VU, enregistrées au greffe de la cour le 20 octobre 1998, les nouvelles observations présentées pour le centre hospitalier spécialisé de Perray-Vaucluse ; ledit centre 1°) entend persister dans ses précédentes écritures ; 2°) conclut à ce qu'il plaise à la cour de porter à 10.854 F la somme que M. BITTON sera condamné à lui verser sur le fondement de l'article L.8-1 du code des tribunaux administratifs et des cours administratives d'appel ; le CHS fait valoir qu'il est surprenant de voir que le bureau d'aide juridictionnelle près le tribunal de grande instance de Paris a pu en fait réformer les décisions de refus successives du bureau d'aide juridictionnelle près le Conseil d'Etat et du président de la section du contentieux du Conseil d'Etat ;
VU, enregistré au greffe de la cour le 9 novembre 1998, le mémoire en intervention présenté pour le Groupe Information Asiles, représenté par son président, qui confirme la recevabilité de la requête de M. BITTON et soutient que le CHS n'apporte pas la preuve que M. BITTON a été informé à un quelconque moment du nouveau protocole thérapeutique qui serait suivi du fait du changement des modalités d'hospitalisation ; que le CHS n'allègue pas s'être efforcé d'obtenir le consentement de l'intéressé à l'hospitalisation libre ;
VU, enregistrées le 8 décembre 1998, les nouvelles observations présentées pour le centre hospitalier spécialisé de Perray-Vaucluse ;
VU l'ensemble des pièces jointes et produites au dossier ;
VU le code de la santé publique ;
VU le code de justice administrative ;
Les parties ayant été régulièrement averties du jour de l'audience ; Après avoir entendu au cours de l'audience publique du 20 novembre 2001 - le rapport de M. COIFFET, premier conseiller,
- les observations de Me MAZETIER, avocat, pour le centre hospitalier de Perray-Vaucluse,
- et les conclusions de M. HEU, commissaire du Gouvernement ;
Considérant que M. BITTON demande à la cour d'annuler le jugement en date du 9 décembre 1994 en tant que le tribunal administratif de Paris a rejeté ses demandes tendant à l'annulation de la décision par laquelle il a été admis à l'infirmerie psychiatrique de la préfecture de police, de la décision de ladite infirmerie le maintenant dans ses locaux jusqu'au 7 février 1986, de la décision de l'administrateur de cette infirmerie ordonnant son transfert au centre hospitalier spécialisé du Perray-Vaucluse, de la décision par laquelle le centre hospitalier de Perray-Vaucluse aurait retardé son départ après l'abrogation de la mesure de placement d'office par un arrêté en date du 23 juin 1986 notifié le 24 juin 1986 et des décisions des 25 juin 1986 et 6 février 1990 prononçant son hospitalisation en service libre au sein du centre hospitalier spécialisé de Perray-Vaucluse ;
Sur la fin de non recevoir opposée par le Centre Hospitalier de Perray-Vaucluse :
Considérant qu'il ressort des pièces versées au dossier que le jugement litigieux du 9 décembre 1994 a été notifié à M. BITTON le 19 janvier 1995 ; que M. BITTON a présenté, le 15 février 1995, une demande devant le bureau d'aide juridictionnelle près le Conseil d'Etat aux fins d'obtenir l'aide juridictionnelle "dans la procédure contre le jugement du 9 décembre 1994" ; que cette demande a été rejetée par une décision du 8 décembre 1995, qui a été notifiée à l'intéressé le 21 décembre 1995 ; que M. BITTON a alors introduit le 7 février 1996 devant le Conseil d'Etat, qui l'a attribuée à la cour administrative d'appel, une requête dirigée contre le jugement du tribunal administratif de Paris du 9 décembre 1994 ; que la production par l'intéressé le 18 août 1997 d'un mémoire complémentaire, improprement qualifié de "recours en appel", est restée sans influence sur la recevabilité de la requête, qui avait bien été introduite dans le délai d'appel ; que, dès lors, contrairement à ce que soutient le centre hospitalier spécialisé de Perray-Vaucluse, ladite requête n'est entachée d'aucune forclusion ;
Sur l'intervention du Groupe Information Asiles :
Considérant que le "Groupe Information Asiles", association qui a pour objet de venir en aide aux victimes d'internements abusifs et de "faire respecter les droits des psychiatrisés" a intérêt à l'annulation des décisions attaquées ; que l'absence de production des statuts de cette association au dossier d'appel demeure sans incidence dès lors que lesdits statuts avaient été produits en première instance ; que la circonstance que la délibération de l'assemblée générale habilitant son président à soutenir toute action contentieuse de M. BITTON contre les mesures relatives à son internement soit antérieure au jugement attaqué n'affecte pas davantage la recevabilité de l'intervention ; qu'il s'ensuit que la fin de non-recevoir opposée par le centre hospitalier spécialisé de Perray-Vaucluse à l'intervention de cette association ne peut qu'être écartée ;
Sur la régularité du jugement attaqué :
Considérant que les premiers juges en expliquant, d'une part, que l'administrateur de l'infirmerie psychiatrique de la préfecture de police de Paris et le directeur du CHS de Perray-Vaucluse s'étaient limités à exécuter les ordres du préfet de police et du commissaire de police du quartier Europe dans le cadre de la procédure de placement d'office alors applicable et n'étaient ainsi à l'origine d'aucune décision susceptible de faire l'objet d'un recours pour excès de pouvoir, et en se référant, d'autre part, aux pièces versées au dossier pour rejeter au fond les demandes d'annulation des décisions susvisées d'hospitalisation en service libre, ont suffisamment motivé leur décision ; que le moyen tiré de l'absence de motivation du jugement attaqué doit dès lors être rejeté ;
Sur les décisions de l'administrateur de l'infirmerie psychiatrique de la préfecture de police en date du 6 février 1986 :
Considérant qu'aux termes de l'article L.343 du code de la santé publique alors applicable : "A Paris, le préfet de police et, dans les autres départements, les préfets ordonneront d'office le placement, dans un établissement d'aliénés de toute personne interdite ou non interdite dont l'état d'aliénation compromettrait l'ordre public ou la sûreté des personnes ; les ordres des préfets seront motivés et devront énoncer les circonstances qui les auront rendus nécessaires (...)" ; qu'aux termes de l'article L.344 du même code dans sa rédaction alors applicable : "En cas de danger imminent attesté par le certificat d'un médecin ou par la notoriété publique, les commissaires de police à Paris, et les maires dans les autres communes, ordonneront à l'égard des personnes atteintes d'aliénation mentale, toutes les mesures provisoires nécessaires, à la charge d'en référer dans les vingt-quatre heures au préfet qui statuera sans délai" ;
Considérant que M. BITTON a fait l'objet le 6 février1986 d'une décision de transfert à l'infirmerie psychiatrique de la préfecture de police prise par le commissaire de police du quartier Europe à Paris sur le fondement de l'article L.344 précité du code de la santé publique ; que, le 7 février 1986, le préfet de police décidait le placement d'office de M. BITTON au centre hospitalier du Perray-Vaucluse sur le fondement des dispositions de l'article L.343 précité du code de la santé publique ; que les premiers juges ont annulé pour défaut de motivation ces deux décisions ; que M. BITTON fait valoir en appel que les autres actes administratifs pris avant et après l'édiction de ces décisions avaient par eux mêmes une autonomie, chacun de ces actes lui faisant grief contrairement à ce qu'ont jugé les premiers juges ;
Considérant qu'en admettant M. BITTON à l'infirmerie psychiatrique de la préfecture de police le 6 février 1986 et en ordonnant son transfert au centre hospitalier spécialisé de Perray-Vaucluse le 8 février, l'administrateur de l'infirmerie psychiatrique s'est borné à exécuter les ordres constitués par les deux décisions sus analysées du commissaire de police du quartier Europe à Paris et du préfet de police ; que l'administrateur en question n'a pas pris par lui même de nouvelles décisions susceptibles de faire l'objet d'un recours pour excès de pouvoir ; que les mesures ainsi prises par l'administrateur de l'infirmerie psychiatrique ne perdent pas leur caractère d'acte ne faisant pas grief, alors même que, postérieurement à la date de leur intervention, la décision du commissaire de police et l'arrêté de placement d'office qui les ont précédées ont été annulés par le juge administratif ; que, par suite, c'est à bon droit que les premiers juges ont rejeté comme irrecevables les conclusions du requérant dirigées contre les prétendues décisions de l'administrateur de l'infirmerie psychiatrique de la préfecture de police ;
Sur les décisions du directeur du centre hospitalier spécialisé de Perray-Vaucluse :
Considérant que, lorsqu'il admet ou maintient dans son établissement un malade dont l'autorité compétente a ordonné le placement d'office ou le maintien en placement d'office, le directeur d'un établissement psychiatrique se borne à exécuter cet ordre et ne prend pas lui-même une nouvelle décision susceptible de faire l'objet d'un recours pour excès de pouvoir ; que le directeur d'établissement ne dispose ainsi, nonobstant l'absence de dispositions expresses en ce sens aux articles L.343 et L.344 du code de la santé publique, d'aucune marge d'appréciation dans la mise en œuvre des décisions prises par les commissaires de police à Paris, les maires ou les préfets et qui s'imposent à lui ; que M. BITTON n'est, dès lors, pas fondé à soutenir que c'est à tort que, par le jugement attaqué, le tribunal administratif de Paris a rejeté comme irrecevables ses demandes dirigées contre les mesures par lesquelles le directeur du centre hospitalier spécialisé de Perray-Vaucluse l'a admis dans son établissement à compter du 8 février 1986 ;
Sur la décision maintenant M. BITTON en placement d'office au CHS de Perray-Vaucluse :
Considérant que M. BITTON dénonce son maintien au sein de l'établissement jusqu'au 25 juin 1986 en dépit de l'intervention d'un arrêté d'abrogation de la décision du placement d'office le concernant en date du 23 juin 1986 ; qu'il ne ressort toutefois d'aucun des éléments du dossier qu'une quelconque décision aurait été prise au sein de l'établissement ayant pour objet de retarder jusqu'au 25 juin 1986 l'exécution de l'arrêté du 23 juin 1986 notifié à l'intéressé le 24 juin 1986 ; qu'il s'ensuit que c'est à bon droit que les premiers juges ont rejeté comme irrecevables les conclusions de M. BITTON dirigées contre une prétendue "décision" de le maintenir en placement d'office au centre hospitalier spécialisé de Perray-Vaucluse ;
Sur les décisions des 25 juin 1986 et 6 février 1990 prononçant l'admission de M. BITTON en hospitalisation libre :
Considérant que l'hospitalisation en service libre dans un établissement public ou privé d'hospitalisation constitue une modalité thérapeutique exclusive de toute contrainte destinée aux malades atteints de troubles psychiques qui ne présentent pas de réactions dangereuses pour leur entourage ; que ce type d'hospitalisation est nécessairement subordonné à une demande du malade ou au moins à son consentement ; que la personne malade ne saurait en conséquence être admise et maintenue au sein de l'établissement d'hospitalisation contre son gré ;
En ce qui concerne la décision du 25 juin 1986 :
Considérant, comme il a été rappelé plus haut, que l'arrêté préfectoral du 7 février 1986 portant placement d'office de M. BITTON au centre hospitalier spécialisé du Perray-Vaucluse a été abrogé par arrêté du préfet de police en date du 23 juin 1986 ; que le centre hospitalier spécialisé dont s'agit rappelle dans ses écritures que ce dernier arrêté bien que notifié à l'intéressé le 24 juin 1986 n'a pas été mis à exécution instantanément, M. BITTON n'ayant pu quitter l'établissement que le 25 juin 1986 ; qu'il ressort des pièces versées au dossier que sur la base d'un bulletin d'admission en service libre du même jour, soit le 25 juin 1986, motivé par le médecin-chef dudit établissement par "l'état de santé de M. BITTON nécessitant son hospitalisation dans son service" et signé pour accord d'admission par le directeur du CHS, M. BITTON a été admis à compter de cette date en service libre de cet établissement ; qu'il n'est pas établi toutefois que l'intéressé ait présenté une demande ni que son consentement à l'hospitalisation libre ait été- recueilli d'une manière ou d'une autre ; qu'il n'est pas non plus établi qu'il aurait été informé du passage du régime de placement d'office à celui de l'hospitalisation libre, comme l'atteste le bulletin d'entrée du 7 février 1990 relative à la seconde hospitalisation de l'intéressé en service libre qui, rappelant l'hospitalisation précédente, se réfère à la période du 7 février 1986 au les mars 1988 sans distinguer selon les régimes juridiques applicables en cause ; que la décision du 25 juin 19866 est dès lors illégale ; qu'il s'ensuit que M. BITTON est fondé à soutenir que c'est à tort que, par le jugement attaqué, le tribunal administratif de Paris a rejeté sa demande tendant à l'annulation de ladite décision ;
En ce qui concerne la décision du 6 février 1990 :
Considérant, en premier lieu, qu'aucune dispositions du code de la santé publique ne s'oppose, contrairement à ce que soutient M. BITTON, à l'existence de services d'hospitalisation libre au sein d'établissements accueillant des malades atteints de troubles mentaux et placés dans ces établissements sur le fondement des dispositions des articles L. 353 et suivants, L.343 et L.344 du code de la santé publique ;
Considérant, en deuxième lieu, que le moyen tiré de la prétendue violation des dispositions des articles L. 333 et suivants du code de la santé publique, dispositions applicables à la seule situation du placement volontaire, ne peut qu'être rejeté comme inopérant ;
Considérant, en troisième lieu, qu'il ressort des pièces versées au dossier, en particulier du bulletin d'entrée en date du 7 février 1990, que M. BITTON est arrivé par ses propres moyens et s'est présenté spontanément le 6 février 1990 au centre hospitalier de Perray-Vaucluse pour demander son admission en service libre ; qu'ainsi, il ne saurait sérieusement soutenir que cette hospitalisation serait intervenue contre son gré ; qu'il s'ensuit que M. BITTON n'est pas fondé à soutenir que c'est à tort que, par le jugement attaqué, le tribunal administratif de Paris a rejeté sa demande dirigée contre la décision du 6 février 1990 ;
Sur les frais irrépétibles :
Considérant qu'en vertu des dispositions de l'article L.8-1 du code des tribunaux administratifs et des cours administratives d'appel, reprises par l'article L. 761-1 du code de justice administrative, le tribunal ne peut pas faire bénéficier la partie tenue aux dépens ou la partie perdante du paiement par l'autre partie des frais qu'elle a exposés à l'occasion du litige soumis au juge ; que les conclusions présentées à ce titre par le centre hospitalier spécialisé de Perray-Vaucluse doivent dès lors être rejetées ;
Considérant, en revanche, qu'il y a lieu, dans les circonstances de l'espèce, de condamner le centre hospitalier spécialisé de Perray-Vaucluse à verser la somme de 3.000 F à M. BITTON au titre des frais exposés par lui et non compris dans les dépens;
DÉCIDEArticle 1er : L'intervention du Groupe Information Asiles est admise.
Article 2 : Le jugement du tribunal administratif de Paris du 9 décembre 1994 est annulé en tant qu'il a rejeté la demande de M. BITTON dirigée contre la décision du 25 juin 1986 prononçant son admission en hospitalisation libre au centre hospitalier spécialisé de Perray-Vaucluse.
Article 3 : La décision du 25 juin 1986 prononçant l'admission de M. BITTON en hospitalisation libre au Centre Hospitalier spécialisé de Perray-Vaucluse est annulée.
Article 4 : Le centre hospitalier spécialisé de Perray-Vaucluse est condamné à verser à M. BITTON la somme de 3 000 F au titre des frais exposés par lui et non compris dans les dépens.
Article 5 : Le surplus des conclusions de la requête est rejeté ainsi que les conclusions du centre hospitalier spécialisé de Perray-Vaucluse tendant à l'application des dispositions de l'article L. 8-1 du code des tribunaux administratifs et des cours administratives d'appel.
Article 6 : Le présent arrêt sera notifié à M. BITTON, au centre hospitalier spécialisé de Perray-Vaucluse, au Groupe Information Asiles et au ministre de l'intérieur.
Délibéré à l'issue de l'audience du 20 novembre 2001 où siégeaient :
Le président de la formation de jugement, M. JANNIN, président de chambre,
Le rapporteur, M. COIFFET, premier conseiller,
Les assesseurs, Mme de ROCCA, Mme DESIRE-FOURRE et M. EVEN, premiers conseillers,
PRONONCÉ À PARIS, EN AUDIENCE PUBLIQUE, LE 4 DÉCEMBRE 2001.Le président,.          Le rapporteur,           Le Greffier,
F. JANNIN               O. COIFFET              V. BOUZIAT